21

 

 

Son plan de bataille arrêté, Quinn était sans pitié : une fois son objectif fixé, plus rien ne pouvait l’en détourner. Il a entrepris d’explorer le secteur à quatre pattes, à la recherche du moindre indice susceptible de le mettre sur une piste. Je me suis contentée de le suivre, en tâchant simplement de ne pas être dans ses jambes. Puis il a fini par en avoir marre de ramper.

— Je vais changer de forme, m’a-t-il annoncé.

Il s’est rapidement dévêtu, a roulé ses vêtements en un ballot bien serré (et tout dégoulinant) et me l’a confié. Je suis donc en mesure de vous dire, et avec un plaisir non dissimulé, que toutes les hypothèses que j’avais pu émettre au sujet de son apparence physique étaient absolument fondées. Il n’avait pas eu une seule seconde d’hésitation au moment de se déshabiller devant moi, mais dès qu’il s’était rendu compte que je le regardais, il s’était immobilisé pour me laisser admirer le spectacle. Même dans la pénombre et sous cette pluie battante, ça valait le coup d’œil. Son corps était une véritable œuvre d’art – une œuvre d’art balafrée, mais une œuvre d’art tout de même.

— Ça te plaît ? m’a-t-il demandé.

— Si ça me plaît ? J’ai l’impression d’être une gamine qui vient d’ouvrir ses cadeaux de Noël !

Il m’a adressé un large sourire ravi. Puis il s’est remis à quatre pattes. Je savais ce qui allait se passer. L’air s’est mis à miroiter, à vibrer autour de lui, et derrière cet écran chatoyant, Quinn a commencé à se métamorphoser. Les muscles ondulaient sous la peau, glissaient, se contorsionnaient ; les os se déformaient ; la fourrure se déroulait comme si elle se dévidait de l’intérieur – je savais que c’était tout bonnement impossible, mais c’était l’impression que j’avais. La scène était proprement hallucinante. Quant à la bande-son, je ne vous en parle même pas : une sorte de gargouillement visqueux, tout poisseux, mais auquel s’ajoutaient des notes râpeuses, comme si quelqu’un remuait un pot de glu bien épaisse rempli de cailloux.

Au bout du compte, je me suis retrouvée avec un tigre face à moi.

Si, sous sa forme humaine, Quinn était un superbe athlète, en tigre, il était absolument splendide. Son pelage, d’un bel orange foncé, était strié de rayures noires, avec de grosses taches d’un blanc immaculé sur le ventre et sous la gorge. Ses yeux bridés n’étaient plus que de petits lacs d’or. Il mesurait près de deux mètres trente de long et faisait, au bas mot, un mètre au garrot. Sur le sol, ses pattes occupaient la place d’une assiette à dessert. Quant à ses oreilles arrondies, elles étaient carrément craquantes. Il s’est avancé vers moi avec une grâce pour le moins inattendue chez un animal aussi massif. Il a frotté son énorme tête contre moi – il a même failli me faire tomber – et s’est mis à ronronner comme un gros chat satisfait avec un compteur Geiger dans le gosier. Son épaisse fourrure laissait une sensation de gras sur les doigts, comme si on l’avait huilée. J’en ai déduit qu’elle devait être imperméable (le veinard !).

Il a alors poussé un feulement sonore et, tout à coup, les marais se sont tus. On aurait pu penser que les animaux sauvages de Louisiane ne reconnaîtraient pas le cri du tigre. Eh bien, si ! Non seulement ils le reconnaissaient, mais il suffisait à leur clouer le bec et à les faire décamper illico pour aller se planquer.

Je me suis agenouillée près du tigre – qui avait été Quinn et qui, d’une certaine manière un peu magique, l’était encore –, j’ai passé les bras autour de son cou et je me suis serrée contre lui. L’odeur était bien un peu envahissante, mais je me suis forcée à l’ignorer, à oublier l’apparence pour ne plus considérer que celui qui se cachait à l’intérieur. Mes embrassades terminées, on s’est remis en route à travers les marais.

Ça m’a un peu déstabilisée de voir ce beau tigre à la grâce si féline marquer son territoire – on ne s’attend pas vraiment que son petit ami se livre à ce genre d’activité, vous comprenez ? –, mais je me suis dit que je serais ridicule de m’en formaliser. Et puis, j’avais vraiment autre chose à penser. Pour commencer, il fallait que je me remue un peu si je ne voulais pas me faire distancer. Quinn cherchait une piste, ce qui nécessitait de couvrir un large périmètre. Or, ma fatigue se faisait de plus en plus sentir. Le premier moment d’émerveillement passé, j’avais vite recouvré mon humeur maussade. J’avais froid, j’avais faim, j’étais mouillée, j’étais crevée : je n’en pouvais plus. Si le plus puissant « émetteur » du comté s’était mis à réfléchir juste sous mes pieds, je crois bien que je ne m’en serais même pas rendu compte.

Tout à coup, le tigre s’est figé. Il s’est mis à humer l’air autour de lui en tournant lentement la tête, ses oreilles suivant le mouvement comme de petits radars en quête de la bonne direction. Puis ses yeux se sont fixés sur moi. Quoique les tigres ne puissent pas arborer ce petit sourire satisfait propre aux humains parvenus à leurs fins, j’ai compris, au sentiment de triomphe qui émanait de lui, qu’il avait trouvé. Le tigre a regardé de nouveau vers l’est, puis vers moi, puis encore vers l’est. Ça, c’était un « Suis-moi » aussi évident que s’il avait été écrit noir sur blanc.

— D’accord.

J’ai posé la main sur son dos pour me laisser guider, et nous nous sommes remis en route. Le trajet à travers les marécages a duré une éternité – bien que, plus tard, j’aie pu estimer que cette « éternité » n’avait, en fait, pas excédé une demi-heure. Peu à peu, le sol sous mes pieds devenait plus stable, plus ferme : l’eau cédait la place à la terre. Enfin, on a laissé les marais derrière nous pour pénétrer dans la forêt.

Quand notre fourgon avait tourné pour emprunter un chemin gravillonné, je m’étais dit qu’on devait approcher de notre destination finale. Je ne m’étais pas trompée. En arrivant à la lisière du bois, on a découvert une clairière dans laquelle se nichait une maisonnette. On était sur le côté ouest du bâtiment, lequel était orienté au nord, et on pouvait voir à la fois la cour, derrière, et le jardin, devant. Le van de nos ravisseurs était garé côté cour. Un autre véhicule était garé côté jardin – une berline quelconque.

La maison elle-même ressemblait à des millions d’autres baraques telles qu’on en voit à travers toute l’Amérique rurale : une sorte de cabane améliorée peinte en marron, avec des volets verts aux fenêtres et des poteaux verts pour soutenir le toit d’une minuscule véranda. Les deux types du fourgon, Clete et George, y avaient pourtant trouvé refuge parce que, si médiocre qu’il soit, c’était le seul abri à des lieues à la ronde.

Son pendant, côté cour, se limitait à une simple terrasse qui s’avançait devant la porte de service. Elle était à peine assez large pour contenir un barbecue à gaz et un balai, et elle était ouverte à tous les vents – vents qui, d’ailleurs, se déchaînaient et s’ajoutaient à la pluie pour former une véritable tempête.

J’ai posé les vêtements et les chaussures de Quinn au pied d’un mimosa du jardin. Quand il a senti l’odeur de Clete, le tigre a retroussé les babines. Il avait des crocs aussi impressionnants que des dents de requin.

La pluie persistante avait fait chuter la température. George et Clete grelottaient dans l’humidité du soir. Ils avaient tous les deux la clope au bec. Deux loups-garous sous leur forme humaine et en train de fumer, de surcroît, n’auraient pas un odorat plus développé que celui d’un humain ordinaire. Rien dans leur comportement ne laissait d’ailleurs supposer qu’ils avaient senti la présence de Quinn. Ils auraient réagi plutôt violemment, j’imagine, s’ils avaient perçu l’odeur d’un tigre. Ce n’est pas le genre d’animal qui court les rues, en Louisiane.

Je me suis frayé un chemin à travers les arbres, contournant la clairière pour me rapprocher au maximum du van. Puis je me suis faufilée jusqu’à la cabine, côté passager. Le véhicule n’était pas fermé. J’ai tout de suite repéré le pistolet paralysant. Ça tombait bien : c’était justement ce que je cherchais. J’ai respiré un bon coup et j’ai ouvert la portière, en espérant que la lumière intérieure n’allait pas attirer l’attention d’une quelconque vigie qui aurait pu faire le guet à une des fenêtres de derrière. Je me suis emparée du pistolet hypodermique dans le fatras entassé entre les deux sièges. J’ai refermé discrètement la portière – pour autant qu’on peut fermer « discrètement » la portière d’une camionnette. Heureusement, le bruit a semblé étouffé par le fracas du vent et de la pluie. J’ai quand même attendu un moment, en retenant mon souffle, mais rien ne s’est produit. J’ai poussé un fébrile soupir de soulagement. Puis, me pliant pratiquement en deux, je suis retournée à l’orée du bois pour m’agenouiller auprès de Quinn.

Il m’a léché la joue. J’ai apprécié cette touchante attention – à défaut d’apprécier l’haleine de fauve – et je lui ai gratté la tête pour le remercier. Après cet échange de gentillesses, j’ai pointé l’index vers l’une des fenêtres orientées à l’ouest – celle de gauche. Elle devait donner sur le salon. Évidemment, Quinn n’a ni hoché la tête ni topé dans ma main d’une patte enthousiaste, mais je crois que je m’attendais quand même qu’il me donne le feu vert, d’une façon ou d’une autre. Il s’est contenté de me regarder sans broncher.

Je me suis relevée avec précaution, avant de m’aventurer en terrain découvert, entre la forêt et la maison, et je me suis dirigée à pas prudents vers la fenêtre éclairée.

Comme je ne voulais pas apparaître au carreau, tel un diable surgissant de sa boîte, j’ai longé la maison et je me suis approchée de profil, de façon à pouvoir jeter un coup d’œil juste dans l’angle de la vitre. Les parents Pelt, Barbara et Gordon, étaient assis sur une causeuse et, à en croire leur attitude, ils ne nageaient pas dans le bonheur. Leur fille, Sandra, faisait les cent pas devant eux – bien qu’il n’y ait pas vraiment de place pour se livrer à ce genre de performance, vu la taille du salon. Les Pelt senior paraissaient prêts à partir en safari-photo, tandis que Sandra, avec son pantalon moulant et son petit pull rayé de couleur vive à manches courtes, semblait plus habillée pour racoler le beau gosse en ville que pour torturer des gens. C’était pourtant bien ce qu’elle avait en tête : les Pelt avaient réussi à faire entrer un imposant fauteuil à dos droit dans la pièce et l’avaient pourvu de sangles et de menottes attachées aux accoudoirs.

Petit détail qui me rappelait quelque chose : il y avait un rouleau d’adhésif argenté posé à côté, prêt à l’emploi.

J’ignorais si les tigres savaient compter, mais j’ai levé la main en repliant deux doigts, au cas où. Avec une prudente lenteur, je me suis alors avancée vers le sud, à moitié accroupie, jusqu’à ce que j’atteigne la deuxième fenêtre. Sur le coup, je me suis sentie plutôt fière de mes dons cachés d’agent secret : signe infaillible de catastrophe imminente qui aurait dû m’alerter. Qui trop triomphe prépare sa chute.

La fenêtre était noire. Pourtant, quand je me suis redressée, je me suis retrouvée nez à nez avec un petit barbu à grosse moustache, assis à une table collée à la fenêtre. On s’est regardés droit dans les yeux. Il en a lâché la tasse de café qu’il tenait à la main, s’aspergeant de liquide bouillant.

Il a hurlé. Quant à vous dire quoi... Je ne suis même pas sûre qu’il ait employé un langage articulé. En tout cas, la réaction ne s’est pas fait attendre : on s’est aussitôt agité côté porte d’entrée et côté salon.

En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, j’avais tourné le coin de la baraque et monté les marches de la petite terrasse. J’ai ouvert la porte grillagée à la volée, poussé la porte en bois et me suis ruée dans la cuisine, pistolet au poing. Le barbu au café était encore en train de s’éponger le visage avec une serviette quand je l’ai touché. Il est tombé comme une masse. Waouh !

Mais le pistolet paralysant devait être rechargé, comme j’ai pu le constater quand Sandra Pelt – qui avait, sur ses parents, l’avantage d’être déjà debout – a débarqué dans la cuisine, les babines retroussées. Le pistolet ne lui a fait ni chaud ni froid, et elle m’a sauté dessus comme... eh bien, comme un loup enragé (et pour cause). Cependant, elle était toujours sous sa forme humaine, et moi, j’étais animée par l’énergie du désespoir.

J’avais déjà assisté à un nombre incalculable de bagarres, au bar, du coup de poing poli, assené sans grande conviction, au corps-à-corps échevelé, quand les types s’étripent allègrement en se roulant par terre : en clair, je savais me battre. Et, au point où j’en étais, j’étais prête à tout. Sandra était teigneuse, mais elle était plus légère et moins expérimentée que moi. Après quelques belles claques administrées sans ménagement, sans oublier les tirages de cheveux en règle, je me suis retrouvée sur elle. Je l’ai clouée au sol. Elle a grogné, claqué des mâchoires pour essayer de me mordre, mais elle ne pouvait pas atteindre ma gorge. De toute façon, j’étais prête à recourir au coup de tête s’il le fallait.

C’est alors que j’ai entendu une voix crier quelque part :

— Fais-moi entrer !

J’ai supposé que c’était Quinn, bloqué derrière une porte quelconque.

— Viens vite ! ai-je braillé à mon tour. J’ai besoin d’aide !

Sandra se tortillait sous moi et je n’osais pas la lâcher, pas même le temps de changer de prise.

— Écoute, Sandra... ai-je dit d’une voix haletante. Mais, bon sang ! Tu vas te tenir tranquille deux secondes, oui !

— Va te faire voir ! a-t-elle rétorqué, avant de redoubler d’efforts pour se libérer.

— Plutôt excitant comme spectacle, a commenté une voix familière.

J’ai levé la tête. Éric nous regardait, les pupilles dilatées dans ses grands yeux bleus. Il était impeccable, dans son jean et sa belle chemise amidonnée à rayures blanches et bleues. Ses longs cheveux blonds brillaient comme s’il venait de les laver, mais (et c’était ça le plus insupportable) ils étaient parfaitement secs. En voyant ça, je l’ai copieusement haï.

— Je ne refuserais pas un petit coup de main, là, lui ai-je lancé, acerbe.

— Oh, mais bien sûr, Sookie ! Quoique j’aime assez ces frétillements... Lâche la fille et relève-toi.

— Seulement si tu es prêt à intervenir, ai-je répliqué, le souffle court.

J’avais un mal de chien à maintenir Sandra au sol.

— Mais je suis toujours prêt, Sookie, a-t-il déclaré, un éclatant sourire aux lèvres. Sandra, regarde-moi.

Mais Sandra était bien trop maligne pour tomber dans le panneau. Elle s’est même empressée de fermer les yeux, sans pour autant cesser de se débattre, bien au contraire. En moins d’une seconde, elle a réussi à libérer un de ses bras et l’a lancé en arrière pour prendre de l’élan. Mais Éric est tombé à genoux et a arrêté le poing de ma rivale avant qu’il ne m’arrive en pleine figure.

— Ça suffit ! a-t-il tout à coup ordonné, d’une voix complètement différente.

Surprise, Sandra a ouvert les yeux. Bien qu’il ne soit toujours pas parvenu à l’hypnotiser, j’imaginais qu’il l’avait bien en main, maintenant. J’ai roulé sur le côté pour m’allonger sur le dos, monopolisant le peu d’espace encore libre dans la minuscule cuisine. Le barbu (ou le grand brûlé ou le pauvre paralysé, si vous préférez) – le propriétaire de la maison, probablement – était ratatiné au pied de la table. Éric, qui semblait avoir presque autant de mal que moi avec Sandra, a fini par adopter une méthode des plus simples : il lui a littéralement broyé la main. Elle a hurlé, puis elle s’est tue et a cessé de se débattre.

— Ce n’est vraiment pas juste, ai-je maugréé, en proie à un nouvel accès de fatigue et de douleur.

— Tout est juste, a-t-il calmement répliqué.

Cet excès d’optimisme ne me disait rien qui vaille.

— Qu’est-ce qui te fait dire ça ?

Il s’est contenté de secouer la tête.

— Où est Quinn ? ai-je demandé.

— Le tigre s’est occupé de vos deux ravisseurs, m’a répondu Éric, avec un sourire que j’ai trouvé assez déplaisant. Tu veux aller voir ce que ça donne ?

— Pas particulièrement, ai-je soupiré en fermant les yeux. Ils sont morts, je suppose ?

— Je suis sûr qu’ils préféreraient l’être, en tout cas. Qu’est-ce que tu as fait au barbu qui gît à tes pieds ?

— Tu ne me croirais pas si je te le disais.

— Essaie quand même.

— Il a eu tellement peur en me voyant qu’il s’est ébouillanté avec son café. Après ça, je l’ai touché avec le pistolet paralysant que j’ai trouvé dans le van.

— Oh !

J’ai perçu une sorte de souffle rauque et, quand j’ai ouvert les yeux, Éric riait en silence.

— Les Pelt ? lui ai-je demandé.

— Rasul les tient en joue. Tu as un nouveau fan, on dirait.

— Oh ! C’est à cause du sang de fée, ai-je grommelé. Tu sais, c’est vraiment nul. Je ne plais pas aux humains – je pourrais te citer au moins deux cents types qui ne voudraient pas de moi, même si j’étais livrée avec leur pick-up, façon cadeau Bonux. Mais parce que les Cess et les vampires sont attirés par l’odeur des fées, on me traite de tombeuse. Tu ne vois pas un truc qui cloche là-dedans ?

— Tu as du sang de fée dans les veines ? s’est exclamé Éric. Tout s’explique.

Aïe ! Il venait de frapper là où ça faisait mal.

— Mais bien sûr ! Tu ne peux pas me trouver à ton goût, tout simplement ! me suis-je écriée, trop épuisée pour conserver un semblant de cohérence. Oh, non, il te faut une bonne raison. Et ça ne peut pas être ma brillante personnalité, hein ? Il faut que ce soit mon sang, parce qu’il est spécial, lui. Mais pas moi, non. Moi, je ne suis pas spéciale...

Et j’aurais sans doute continué comme ça un bon bout de temps si Quinn n’était pas intervenu :

— Je n’en ai rien à faire, moi, des fées.

Le peu d’espace encore disponible dans la cuisine venait de se volatiliser.

Je me suis relevée en quatrième vitesse.

— Ça va ? me suis-je inquiétée d’une voix tremblante.

— Oui.

Quinn était redevenu humain, et il était complètement... nu. J’aurais bien voulu le serrer dans mes bras, mais j’aurais été un peu gênée de l’embrasser devant Éric, surtout dans ces conditions.

— J’ai laissé tes vêtements dehors, sous les arbres, lui ai-je annoncé. Je vais aller les chercher.

— Je peux le faire.

— Non. Je sais où ils sont. Et puis, je ne peux pas être plus mouillée que je ne le suis déjà, de toute façon.

Sans compter que je ne me sentais pas tout à fait à l’aise en compagnie d’un type à poil, d’un autre inconscient, d’une garce pur jus et d’un autre mec qui se trouvait être mon ex-amant.

— Va te faire voir, sale chienne ! m’a lancé la garce en question, comme je tournais les talons, avant de pousser un nouveau cri – Éric lui ayant fait clairement comprendre qu’il n’aimait ni les insultes ni la vulgarité.

— Toi-même, ai-je marmonné en ressortant à pas lourds.

Dehors, comme j’aurais pu m’en douter, il pleuvait encore. Je ruminais toujours cette histoire de sang de fée en récupérant le ballot de vêtements trempés. Franchement, imaginez que la seule raison pour laquelle on vous aime soit parce que vous avez du sang de fée dans les veines ! Avouez qu’il y a de quoi plonger en pleine zone dépressionnaire. Ma météo perso en prenait, doucement mais sûrement, le chemin. Oh ! Et il ne fallait pas oublier le vampire de service qui avait reçu l’ordre de me séduire. Je ne doutais pas que le sang de fée ait juste été un bonus, dans ce cas...

Mais, après tout, si je considérais la chose d’un point de vue strictement logique, le sang en question faisait autant partie de moi que la couleur de mes yeux ou l’épaisseur de mes cheveux. En tout cas, ça n’avait pas beaucoup aidé Granny – à supposer que le gène m’ait été transmis par elle et non par mes autres grands-parents. Elle avait épousé un homme qui ne l’aurait pas traitée autrement si elle avait eu dans les veines un bon petit cru cent pour cent humain. Et elle avait été assassinée par une ordure qui n’avait connu de son sang que la couleur. En partant du même principe, le sang de fée n’avait pas changé grand-chose pour mon pauvre père non plus. Il n’avait jamais rencontré de vampire qui aurait pu s’intéresser à lui à cause de ça – du moins, il ne s’en était pas vanté. Et le sang de fée ne l’avait pas protégé de la crue brutale qui avait emporté sa voiture, la faisant tomber du pont sur lequel elle se trouvait pour la précipiter dans la rivière en furie. Et si c’était ma mère qui m’avait légué ce sang, eh bien, elle était morte avec mon père. Et, quel qu’ait été son patrimoine génétique, ça n’avait pas empêché Linda, la sœur de ma mère, de mourir à la quarantaine d’un cancer.

Je ne trouvais pas que ce miraculeux sang de fée ait fait beaucoup pour moi non plus. D’accord, ça avait peut-être poussé quelques vampires à s’intéresser à moi de plus près et à se montrer plus amicaux avec moi qu’ils ne l’auraient sans doute été avec une humaine ordinaire. Mais je voyais mal en quoi ça avait été un avantage.

À vrai dire, beaucoup de gens auraient probablement estimé que cette attention toute particulière m’avait fait plus de mal que de bien. Il n’était pas impossible que je fasse partie de ces gens-là, d’ailleurs. Surtout telle que j’étais là, plantée sous une pluie battante, avec un ballot de fringues qui ne m’appartenaient pas.

En retournant vers la maison, j’ai entendu tout un tas de gémissements. Ils semblaient provenir du jardin – George et Clete, vraisemblablement. J’aurais dû aller vérifier, mais je n’en ai pas eu le courage.

Dans la cuisine, le petit brun barbu commençait à se réveiller : il clignait des paupières et grimaçait. Quelqu’un lui avait attaché les mains derrière le dos. Sandra avait, elle aussi, été ligotée avec du ruban adhésif, ce qui m’a remonté le moral. Juste retour des choses, non ? Elle en avait même un beau rectangle bien net scotché sur la bouche. L’œuvre d’Éric, à n’en pas douter. Quinn avait trouvé une serviette qu’il avait drapée autour de ses reins. Ça lui donnait un petit air après match, sortie de vestiaire.

— Merci, bébé.

Il a pris les vêtements que je lui tendais et les a essorés dans l’évier. Quant à moi, je dégoulinais sur le carrelage.

— Je me demande s’il y a un sèche-linge, a-t-il murmuré.

J’ai ouvert la troisième porte de la cuisine. Elle donnait sur une petite pièce qui faisait à la fois office de buanderie et de garde-manger. Il y avait des étagères sur un mur et un chauffe-eau au-dessus d’une machine à laver avec fonction sèche-linge.

— Passe-moi tes vêtements, lui ai-je crié.

— Tu devrais mettre les tiens avec, bébé, m’a-t-il conseillé, en me tendant les siens.

Il semblait aussi lessivé que moi. Il est vrai que se changer en tigre plusieurs fois dans la même journée, en dehors de la pleine lune et en si peu de temps, ça n’avait pas dû se faire tout seul.

— Tu pourrais peut-être me trouver une serviette, alors ?

Et j’ai commencé à ôter mon collant mouillé, non sans mal. Sans l’ombre d’un sourire suggestif, sans même avoir à se censurer pour m’épargner les blagues de potache sur le sujet, il est parti voir ce qu’il pouvait me dégoter. Il est rapidement revenu, avec des vêtements probablement dénichés dans la chambre du petit barbu : un tee-shirt, un short et des chaussettes.

— C’est tout ce que j’ai pu trouver, a-t-il dit d’un air navré.

— C’est mieux que je n’aurais osé espérer.

Pouvoir m’essuyer avec la serviette qu’il m’avait apportée et enfiler des vêtements propres et secs m’a fait un bien fou – j’en aurais presque pleuré. Je me suis contentée d’une brève étreinte pour exprimer ma gratitude à Quinn et je suis allée voir ce que devenaient nos otages.

Les Pelt étaient assis par terre dans le salon. Ils avaient été menottés et placés sous la surveillance de Rasul. Barbara et Gordon m’avaient semblé plutôt inoffensifs, en parents éplorés, quand ils étaient venus me voir Chez Merlotte. Ils n’avaient plus rien d’inoffensif, à présent. La rage et la haine qui les défiguraient détonnaient étrangement avec leur allure de petits-bourgeois.

Éric m’avait suivie avec Sandra que, d’une violente poussée, il a envoyée rejoindre ses parents. Il est ensuite allé se caler dans l’embrasure d’une porte. Quinn occupait déjà l’autre. Avec de tels renforts, Rasul a pu relâcher un peu sa vigilance – sans abaisser son arme pour autant.

— Où est passé le petit barbu ? s’est-il enquis. Sookie, je suis heureux de voir que vous vous portez si bien, quoique votre tenue soit très en deçà de votre standing habituel.

Mon short était dans le style commando : ample, kaki et plein de poches ; le tee-shirt était trop grand pour moi. Quant aux chaussettes blanches, c’était le bouquet !

— Vous savez vraiment parler aux femmes, Rasul, lui ai-je répondu, en rassemblant ce qui me restait d’énergie pour lui offrir un piètre sourire.

Je suis allée m’asseoir dans le fauteuil et je me suis tournée vers Barbara Pelt.

— Qu’est-ce que vous comptiez faire de moi au juste ? lui ai-je alors demandé.

— Vous cuisiner jusqu’à ce que vous nous avouiez la vérité et que Sandra soit satisfaite. Nous ne pourrons pas retrouver la paix dans notre famille tant que nous ne connaîtrons pas la vérité. Et c’est vous qui la détenez, je le sais, je le sens.

Ça m’a troublée, et je n’ai plus su quoi lui dire, sur le moment. Mon regard est passé d’Éric à Rasul.

— Vous n’êtes que tous les deux ?

— Le jour où deux vampires ne suffiront plus à maîtriser une poignée de lycanthropes, je redeviendrai humain, a répliqué Rasul, avec une expression si hautaine que j’ai presque été tentée d’en rire.

Il avait parfaitement raison, bien sûr – quoiqu’ils aient quand même pu compter sur le soutien d’un tigre, en l’occurrence. Ledit tigre me faisait actuellement face, en appui contre le chambranle, sous sa forme humaine et singulièrement dénudé. Mais sur le moment, ce généreux étalage de peau lisse et de chair musclée m’a laissée totalement indifférente.

— Éric, qu’est-ce que je devrais faire, d’après toi ?

Je ne croyais pas avoir jamais demandé conseil à Éric auparavant. Il a d’ailleurs paru surpris. Mais le secret que j’avais jusqu’alors si bien gardé n’était pas seulement le mien...

Au bout d’un moment, il a hoché la tête en silence.

— Je vais vous dire ce qui est arrivé à Debbie, ai-je alors annoncé aux Pelt.

Je n’ai pas prié Rasul, ni Quinn de quitter la pièce. J’allais enfin me décharger de tout ça, là, maintenant, à la fois de cette culpabilité qui ne m’avait pas lâchée et de l’emprise qu’Éric avait sur moi.

J’avais pensé à cette scène si souvent que les mots me sont venus naturellement. Je n’ai pas pleuré : je n’avais plus de larmes pour ça. Je les avais déjà versées des mois auparavant, en privé.

Au terme de mon récit, les Pelt sont restés assis, à me dévisager. Je n’ai pas baissé les yeux.

— Ça ressemble bien à notre Debbie, a finalement admis Barbara Pelt. Cette histoire sonne juste.

— Elle avait effectivement un pistolet, a renchéri Gordon Pelt. Je lui en avais offert un pour Noël, il y a deux ans.

Les deux lycanthropes se sont regardés.

— Debbie était... une femme d’action, a ajouté Barbara au bout d’un moment, avant de se tourner vers Sandra. Tu te rappelles, quand on a été obligés d’aller au tribunal ? Elle était au lycée, à l’époque, et elle avait mis de la colle extraforte sur la brosse à cheveux de cette fille qui sortait avec son ex. C’était Debbie tout craché, hein ?

Sandra a hoché la tête – son bâillon l’empêchait de parler. Elle avait les joues ruisselantes de larmes.

— Vous ne vous souvenez toujours pas de l’endroit où vous l’avez enterrée ? a demandé Gordon à Éric.

— Si je le savais, je vous le dirais, a rétorqué ce dernier, avec un petit « Comme si j’en avais quelque chose à faire ! » dans le ton.

— C’est vous qui avez engagé les deux mômes qui nous ont attaqués à Shreveport ? a demandé Quinn aux Pelt.

— C’est Sandra, a reconnu Gordon. Nous l’ignorions, et quand nous l’avons appris, elle les avait déjà mordus. Elle leur avait promis...

Il a secoué la tête, avant de poursuivre :

— Après avoir accompli leur mission à Shreveport, ils devaient rentrer pour venir chercher leur récompense. Notre meute – la meute de Jackson – les aurait tués. Les hommes-loups ne sont pas admis dans le Mississippi. Les garçons auraient forcément accusé Sandra de les avoir mordus, et la meute l’aurait exclue. Barbara donne un peu dans la sorcellerie, mais pas à un niveau suffisant pour obliger ces garçons à tenir leur langue. Quand nous avons appris ça, nous avons engagé un des nôtres, un mercenaire, pour les traquer. Il n’a pas pu les arrêter à temps, ni empêcher leur interpellation. Alors, il s’est fait écrouer à son tour pour gérer le problème de l’intérieur.

Il a levé les yeux vers moi en secouant de nouveau la tête, la mine sévère.

— Il a soudoyé Cal Myers pour se faire enfermer dans la même cellule que vos agresseurs. Nous avons puni Sandra pour ça, bien entendu, s’est-il empressé d’ajouter.

— Oh ! L’avez-vous privée de téléphone portable pendant une semaine ?

Et s’ils trouvaient mon ton un peu trop sarcastique, tant pis pour eux ! J’avais bien le droit de l’être, non ?

— On a été blessés, tous les deux ! ai-je poursuivi en désignant Quinn du menton. Et ces deux garçons sont morts, maintenant. Et tout ça à cause de Sandra !

— C’est notre fille, a protesté Barbara. Elle croyait venger le meurtre de sa sœur.

— Et, après ça, vous avez engagé tous les loups-garous qui nous sont tombés dessus à La Nouvelle-Orléans. Deux d’entre eux sont en ce moment dans le jardin, devant la maison, dans un triste état. Vont-ils mourir, Quinn ?

— Si on ne les emmène pas rapidement chez le médecin, c’est fort possible. Un médecin lycanthrope, j’entends : il est clair qu’ils ne peuvent pas aller dans un hôpital classique.

Des griffes de tigre, ça laisse des traces. Des traces un peu suspectes...

— Est-ce que vous allez seulement le faire ? ai-je demandé aux Pelt, sceptique. Allez-vous emmener Clete et George chez un de vos toubibs ?

Les Pelt se sont consultés du regard, avant de hausser les épaules en chœur.

— C’est-à-dire que... nous pensions que vous alliez nous tuer, s’est étonné Gordon. Vous allez vraiment nous laisser partir ? Mais... que demandez-vous en échange ?

Je n’avais encore jamais rencontré de gens comme les Pelt et j’avais de moins en moins de mal à comprendre de qui Debbie tenait son charmant caractère – qu’elle ait été adoptée ne changeait rien à l’affaire.

— Juste une chose : que je n’entende plus jamais parler de tout ça. Et Éric non plus, ai-je répondu. Ni Éric ni moi.

Jusqu’alors, Quinn et Rasul s’étaient contentés d’écouter en silence. Mais, à ce moment-là, Quinn est intervenu :

— Sookie est une alliée de la meute de Shreveport, leur a-t-il rappelé. Et les loups-garous de Shreveport ont été furieux qu’elle se fasse agresser par des hommes-loups dans leur propre ville. Or, maintenant, nous savons qui est responsable de cette agression...

— Le chef de meute de Shreveport ne la porte pas dans son cœur, d’après ce qu’on dit...

Il y avait une très perceptible pointe de mépris dans la voix de Barbara. N’ayant plus à craindre pour sa vie, elle recouvrait sa vraie personnalité. Je la préférais terrorisée.

— Il se pourrait qu’il ne reste pas chef de meute très longtemps, a répliqué Quinn d’un ton qui, pour être parfaitement calme, n’en était pas moins menaçant. Et même s’il reste à son poste, il ne peut pas revenir sur la promesse de son prédécesseur. L’honneur de la meute serait en jeu.

— Ils obtiendront réparation, a affirmé Gordon d’un ton las.

— C’est vous qui avez envoyé Tanya à Bon Temps ? leur ai-je alors demandé.

Barbara s’est subitement rengorgée.

— Oui, c’était mon idée. Vous savez que nous avions adopté Debbie, n’est-ce pas ? C’était une renarde-garou.

J’ai opiné du bonnet. Éric semblait perplexe : il n’avait jamais rencontré Tanya.

— Tanya appartient à la famille biologique de Debbie, et elle voulait faire quelque chose, nous apporter son aide d’une manière ou d’une autre. Elle a pensé qu’en allant à Bon Temps, elle pourrait peut-être vous tirer les vers du nez. Mais elle nous a dit que vous étiez trop soupçonneuse pour accepter l’amitié qu’elle vous offrait. Je pense qu’elle va rester à Bon Temps, cependant. J’ai cru comprendre que le propriétaire du bar n’était pas dénué d’un certain charme : un bonus inattendu, en fait, et bienvenu...

C’était gratifiant, en un sens, de découvrir que Tanya était aussi peu digne de confiance que je l’avais suspecté. Je me suis demandé si j’avais le droit de raconter à Sam toute l’histoire... La question méritait réflexion. Mais je verrais ça plus tard.

— Et le type à qui appartient cette baraque ? me suis-je inquiétée, en entendant le barbu gémir et grogner dans la cuisine.

— C’est un ancien camarade de lycée de Debbie, m’a répondu Gordon. Nous lui avons emprunté sa maison pour l’après-midi. Nous l’avons payé, bien sûr. Il ne parlera pas.

— Et Magnolia ?

Je revoyais encore les deux moitiés de corps brûler sur mon gravier, et je me souvenais de la douleur de Diantha.

Les trois Pelt m’ont dévisagée sans comprendre.

— Magnolia ? La fleur ? s’est étonnée Barbara, manifestement perplexe.

Fausse piste.

— Êtes-vous d’accord pour estimer qu’après ça, nous serons quittes ? ai-je demandé, tentant le tout pour le tout. Je vous ai fait du mal, vous m’avez rendu la pareille : match nul, non ?

Sandra secouait vigoureusement la tête, mais ses parents l’ont ignorée. Dieu bénisse l’inventeur de l’adhésif extrafort ! Gordon et Barbara se sont adressé un petit signe de tête.

— Vous avez tué Debbie, mais nous pensons que c’était vraiment un acte de légitime défense, a admis Gordon. Et notre fille cadette a employé des méthodes quelque peu... drastiques et tout à fait illégales pour se venger de vous... Ça m’écorche la bouche de le dire, mais je crois qu’à partir d’aujourd’hui, nous devons accepter de vous laisser tranquille.

Sandra se battait avec son bâillon, émettant tout un tas de sons inarticulés.

— À la condition expresse, a repris Gordon, avec, dans les yeux, un regard dur comme un roc, que vous ne poursuiviez pas Sandra et que vous ne mettiez plus les pieds dans le Mississippi.

J’ai immédiatement accepté.

— Marché conclu. Mais saurez-vous obliger votre fille à honorer sa part du contrat ?

Quoique frisant l’impolitesse, ça n’en était pas moins une très bonne question. Sandra avait plus de cran qu’une section commando à elle toute seule, et je doutais que les Pelt aient jamais eu beaucoup d’emprise sur leurs deux filles.

Gordon s’est alors tourné vers sa cadette. Dans son visage réduit au silence, les prunelles de la jeune fille brûlaient comme des braises prêtes à s’enflammer.

— C’est la loi, Sandra, lui a-t-il expliqué. Nous avons donné notre parole à cette femme, et tu es liée par notre serment. Si tu défies mon autorité, je te provoquerai en combat singulier à la prochaine pleine lune. Je t’écraserai devant toute la meute, Sandra.

Mère et fille semblaient aussi choquées l’une que l’autre, Sandra plus encore que sa mère. Elle a plissé les yeux, puis, après mûre réflexion, a hoché la tête.

J’espérais que Gordon vivrait très longtemps et qu’il jouirait d’une bonne santé jusqu’à la fin de ses jours. Si jamais il tombait malade ou s’il mourait, Sandra s’estimerait déliée de son serment, j’en étais persuadée.

Mais, en sortant de la petite maison dans les marais, je me suis dit que j’avais de bonnes chances de ne jamais revoir les Pelt, et j’en étais absolument ravie.

La reine des vampires
titlepage.xhtml
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_000.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_001.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_002.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_003.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_004.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_005.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_006.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_007.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_008.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_009.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_010.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_011.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_012.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_013.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_014.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_015.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_016.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_017.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_018.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_019.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_020.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_021.htm